De graves présomptions de pillages sont contenues dans un rapport d’audit de l’Inspection générale d’Etat (IGE) et mettent en cause la gestion de l’ancien directeur général du Laboratoire national d’appui au développement agricole (LANADA), Ardjouma Dembélé. Celui-ci dément toute implication, déclarant que l’affaire devrait bientôt aboutir à un non-lieu.
C’est par correspondance en date du 27 janvier 2021, que le Conseil de gestion du LANADA, un établissement public a saisi l’IGE. Celui-ci souhaitait qu’un audit cible l'émission de douze chèques, par le directeur général sortant, le Prof Ardjouma Dembélé, à la veille de la passation des charges avec son successeur ; Dr Charlotte Amatcha-Lepry. L’IGE de Théophile Ahoua N’Doly, en profite pour étendre l’audit à la gestion 2017-2018 (notons que l’IGE avait déjà audité le LANADA en 2016 et avait déjà relevé des irrégularités).Fraude et dépenses non justifiéesTrois points majeurs ressortent de cet audit, qui a été consulté par Ivoir’Hebdo. Sur le point des douze chèques, le rapport pointe nommément une « fraude ». En clair, « les investigations décèlent que, sur les douze (12) chèques concernés, six (06) présentent des dossiers entachés d'irrégularités. Ceux-ci sont évalués à vingt-trois millions six cent quatre-vingts mille huit cent quatre- vingt-quinze (23 680 895) F CFA », lit-on.Le deuxième point concerne des dépenses non justifiées. « La mission note que toutes les dépenses ordonnancées par le LANADA sur la période 2017-2020, d'un montant de 1 912 887 511 FCFA sont justifiées partiellement. En effet, seul le montant de 1 662 267 192 FCFA est justifié et payé. L'écart entre les dépenses justifiées et les dépenses non justifiées s'élève à 250 620 319 FCFA.2.2 milliards FCFA dilapidés Le troisième axe est relatif à la gestion d’une subvention globale élevée à 2 210 007 968 FCFA, accordée par l’Etat au LANADA durant la période allant de 2017 à 2020. Celle-ci devrait servir à réhabiliter les laboratoires. « A l'évidence, les travaux de réhabilitation n'ont pas été menés à terme, alors que les prestataires ont perçu l'intégralité des frais. C'est le cas du Laboratoire régional de Bouaké », relèvent les auditeurs. Selon ceux-ci, certaines entreprises adjudicataires des marchés de construction des laboratoires, ont confirmé avoir été effectivement payées, mais reconnaissent n’avoir pas encore bouclé les opérations de réhabilitation, pour des raisons diverses. Pourquoi Ardjouma Dembélé a pris sur lui de mépriser les processus internes qui exigent que des pièces de bonne exécution des travaux soient présentées avant de payer en intégralité un prestataire ? Selon le rapport, celui-ci explique le payement, en ce qui concerne le dossier précis de la réhabilitation inachevé du Laboratoire régional de Bouaké, par « un manque d'attention ». Vrai ou faux ? Toujours est-il qu’interrogé par nos soins, l’ancien directeur général dont la gestion et celle de certains de ses anciens collaborateurs, sont épinglées, a évoqué un « dossier vide » (voir encadré). Rappelons que ce n’est pas la première fois que la gestion du Prof Ardjouma Dembélé est épinglée par l’IGE. En novembre 2016, une mission d’audit avait conclu à de graves irrégularités dans la gestion du LANADA. En cause, le directeur général, mais aussi plusieurs de ses collaborateurs d’alors. Ardjouma Dembélé : « L’affaire est pratiquement en fin de parcours pour un non-lieu »L’ancien directeur général du LANADA, Ardjouma Dembélé, interrogé sur les trois points incriminant (réhabilitation de laboratoires à hauteur de 2 milliards FCFA, plus de 250 millions FCFA de dépenses non justifiées et émission de douze chèques après son limogeage) a répondu, au téléphone, qu’il ne saurait se prononcer en profondeur, l’affaire étant au niveau de la police économique, ajoutant qu’il porterait plainte si un article le mettait abusivement en cause. Ci-dessous l’essentiel de sa réponse.« J’ai été entendu par la police économique depuis décembre, et pratiquement, on me dit que le dossier est vide. L’affaire est à la police économique. Veuillez-vous adresser à la police économique, je peux vous donner le nom du commissaire chargé de l’affaire ou référez-vous au directeur de la police économique. Je ne peux pas vous répondre dans la mesure où les autorités compétentes en la matière avaient saisi la justice. C’est une affaire qui est pratiquement en fin de parcours pour un non-lieu, je ne peux pas me permettre de vous donner des éléments sauf si la police ou le procureur me dit que je peux répondre à ces faits. Je ne sais pas où vous avez eu ces éléments sinon si je vois des écrits me concernant, je vais déposer plainte contre vous. Il y a beaucoup de mensonge dans l’affaire. Ils sont mieux placés pour vous donner des éléments véridiques de ce qui s’est passé ». Prince Beganssou